village de moissey

moissey: premiers coups de mine à la carrière

le travail arrêté depuis le 14 avril 1959 a repris sous l'impulsion d'une nouvelle compagnie

article Le Progrès du 8 février 1961/ Les dépêches du 10 février 1961

l'auteur de cet article publié dans les deux journaux locaux de l'époque pourrait être Henri Lépeule

C'est en effet le 11 mars 1959 que la Société Cogenor a été mise en liquidation judicaire. Les syndics chargés de cette liquidation ont bien tenté de continuer le travail jusqu'au 14 avril 1959, date où la concession établie pour trois ans, par la commune, prenait fin, mais ils se sont vite rendus compte que le travail dans cette carrière était particulièrement difficile, le matériel était fatigué, les créanciers demandaient leur argent et aucune commande n'était faite, il fallait fermer les portes.

Une vingtaine de familles se trouvaient ainsi sans ressources. La commune de Moissey intervenait maintes fois avec énergie, les administrations, à la sous-préfecture, aux Ponts et Chaussées, aux Eaux et Forêts, essayaient de de trouver un entrepreneur sérieux et valable.

La carrière de Moissey n'est pas une carrière comme les autres. Il faut aller à 200 km pour trouver un gisement semblable. La pierre est particulièrement dure, c'est une espèce de porphyre appelée "eurite", d'origine primaire. Sa dureté en fait le revêtement idéal des routes, revêtement qui empêche tout dérapage car le gravillon obtenu reste à angles vifs. Les usagers de la route savent bien le reconnaître. Le banc exploité, très étroit, une cinquantaine de mètres au maximum, part de Moissey et va jusqu'à Serre-les-Moulières, traversant le massif de la Serre, sur plusieurs kilomètres. En 1914, l'armée a commencé à exploiter au lieu-dit "les Gorges", mais le banc se termine là et la pierre n'y est pas de bonne qualité. C'est vraiement en 1930 que l'exploitation actuelle a commencé, grâce à un homme d'une rare énergie, M. Jean-Marcel Téliet, qui patiemment, a réussi à aménager cette carrière.

Après une interruption due à la guerre de 39-45, il mettait en marche de nouvelles installations, et en 1950, obtenait de la commune de Moissey un bail amphytéotique de 99 ans sur 1,78 ha de terrain pour y faire des installations solides, et une concession pour exploitation de trois ans renouvelable. Tout marchait bien, quand subitement, le 14 novemebre 1954, M. Jean-Marcel Téliet décédait.

Les successeurs devaient, après un an d'efforts, abandonner la partie. La Société COGENOR, dirigée par M. Hubert Chewalinsky, prenait la suite. Elle construisait une installation très moderne, faisait des investissements considérables, et grâce à un important marché de fournitures au camp d'aviation de Broyes-les-Pesmes, plus de 150 000 mètres-cubes en un an, travaillait à un rythme jusqu'alors inconnu. Mais Broyes-les-Pesmes terminé, les commandes se firent rares, le beau matériel n'était payé qu'en partie et c'était la liquidation judiciaire avec un passif impressionnant.

Nouvelles difficultés, la partie du banc d'eurite situé au sud de la route de la Serre est est épuisée: il faut passer de l'autre côté, déboiser, effectuer une nouvelle découverte. Ce sont de nouveaux onvestissements fort importants à prévoir. C'est pourquoi, pendant de longs mois, les entrepreneurs intéressés viennent sur place, font des calculs, hésitent. Enfin, M. Pernot, entrepreneur de carrières bien connu dans la région de Champagnole, associé à une importante société de la Gironde, constitue une société nouvelle "les carrières de Moissey", achète à la Cogenor ses installations et obtient de la commune de Moissey le bail amphytéotique à son profit.

En septembre, une concession d'exploitation proprement dite

Les travaux commencent. Il faut remettre en état tout le matériel racheté et laissé presqu'à l'abandon depuis près de deux ans et surtout, au nord de la route, enlever toute la terre, les troncs d'arbres pour mettre le banc d'eurite à nu afin de créér un nouveau front de carrière. La pluie qui ne cesse de tomber crée des difficultés incroyables: la terre argileuse qui se transforme en boue glisse de chaque côté du bull-dozer qui ne peut faire son travail. une nouvelle installation, un scraper doit être monté: ses godets permettront, pense-t-on, de faire ce travail. Une route doit être construite pour emmener la pierre vers les concasseurs.

Les ateliers ne sont pas encore réparés et bien du travail est encore nécessaire pour que tout soit aménagé.

Mais depuis quelques jours, l'installation proprement dite commence à fonctionner et nous lui avons rendu visite. Dans le front de carrière ancien, plus de vingt mètres de hauteur, de nouvelles mines ont éclaté. Une hoog charge de gros blocs sur un camion. Celui-ci les emmène au puissant concasseur capable d'écraser par jour 1000 mètres-cubes de blocs atteignant parfois un demi-mètre-cube et de le transformer en pierres de 5 à 10 cm de diamètre. Celles-ci sont emmenées par un grand tapis roulant sur un vaste emplacement en forme d'entonnoir où elles sont reprises par un autre tapis et emmenées dans un crible primaire. Là, la pierre est riée en trois catégories: grosse, moyenne, petite; la terre est séparée et envoyée dans un stockeur. La grosse pierre passe dans un nouveau broyeur. Le produit obtenu ainsi, la moyenne et la petite pierre sont acheminées séparément, les une vers de nouveaux broyeurs ou vers les tapis légèrement obliques qui trieront le gravier en trois catégorilles: gros, moyen, petit. Ce qui est trop fin est séparé. Tout ce qui se trouve trop gros repasse à nouveau dans de petits concasseurs par de nombreux circuits.

Le résultat, vous le connaissez, ce sont les tas de gravillons que vous trouverez à nouveau sur le bord de nos routes du Jura dès le printemps prochain, gris ou rose: il est facile de le reconnaître, le sable de rivière concassé n'a qu'une ou deux arêtes vives, un côté au moins étant arrondi. Celui-ci, que vous le mettiez dans n'importe quel sens, accroche le pneu ou la semelle des souliers. Car, une autre caractéristique de la pierre de cette carrière, c'est qu'elle n'est pratiquement achetée que par les Ponts et Chaussées pour le revêtement des routes. Etant très dure, elle coûte très cher à extraire et à broyer, le matériel s'use avec une vitesse prodigieuse. C'est pourquoi on peut envisager de l'utiliser que pour la partie supérieure de la chaussée, tout ce qui est en dessous étant en calcaire. Un marché de fournitures aux Ponts et Chaussées du Jura est dès à présent acquis. D'autres marchés se feront certainement avec le Doubs, la Côte d'Or, la Haute-Saône car Moissey se trouve à quelques kilomètres de ces différents départements et les approvionnait déjà il y a une dizaine d'années.

D'autres projets d'extension de l'utilisation des produits de la carrière sont d'ores et déjà envisagés. Nous en reparlerons plus tard. Souhaitons dès à présent un succès à MM. Pernot Père et Fils, directeurs de cette carrière et une grande prospérité, la seule du canton de Montmirey-le-Château permettant ainsi à des familles d'ouvriers aimant la campagne de vivre normalement dans notre région et de redonner à Moissey une activité qu'elle avait perdue.

les trois photos qui suivent sont extraites des Dépêches (bromures d'affichage)

René Schorsch, au pied de son camion.

Camille Pernot en train de souder.

le P2 en réparation.

les trois photos qui suivent sont extraites du Progrès (journal de 1961 scanné)

Le chargeur au travail.

José Raposo sur le broyeur P110.

« Mon grand-père s'appelait Joseph Raposo (dit José), il est né le 13 janvier 1900 et est décédé le 23 mars 1976. Il est arrivé en France vers 1927 et ma grand-mère l'a rejoint en 1928; puis ils se sont installés à Moissey vers 1930. Il a travaillé à la carrière en tant que gardien de nuit (d'après ma tante Flavie) ce qui lui a permis d'aider les FFI pendant la guerre. Seule ma tante Aurélie est née au Portugal.»

Nathalie Generet, fille de Françoise Raposo, donc petite-fille de José..

Sur le P2, tout le monde est au boulot (Camille Pernot à gauche).

moissey.com

autres articles sur le porphyre de Moissey

textes de:

Christel Poirrier

1. La carrière ballastière des Gorges de 1920 (recherche de 1971)

2. La carrière ballastière des Gorges, vue aérienne militaire (1925)

Christel Poirrier

3. L'entreprise Jean-Marcel Téliet, (en 1931)

4. Images de la "Cantine d'Offlanges" des années 30, avant la réhabilitation (2003)

Le Progrès-Les Dépêches

5. La carrière porphyrique, la reprise par la famille Pernot, en 1960

6. La carrière porphyrique, vues aériennes DDA/IGN (1953 et 1962) et plan IGN (1979)

7. Le poste d'enrobé de la SCREG sur place (1971)

Le Progrès

8. L'un des meilleurs porphyres de France est extrait à Moissey, le Progrès (1971)

Jérôme Cornéglio

9. L'Eurite de Moissey, par Jérôme Cornéglio (1991)

Christel Poirrier

10. Avec Jean Nicolin, carrier au long cours (1996)

Christel Poirrier

11. L'Eurite de Moissey, par Charles Mignot (1996)

Peinture de ELG et FM

12. Le Poste UN, par le peintre Elisabeth Le Gros (2001) et son papa (1968)
12bis. Le Poste UN, par le peintre Fabrice Martin, aquarelle de 2008

Christel Poirrier

13. les témoins de la carrière porphyrique (1996 et plus tard)

14. Cartes Postales aériennes la carrière de Moissey au long du temps (en attente d'autorisations)

15. Vues aériennes des Carrières de Moissey en 1999

les Moisseyais

16. L'image de couverture, mais en entier (vue aérienne de 1999)

Christel Poirrier

17. La carrière de Moissey, état des lieux, avec Jean-Louis Dengerma, le 15 avril 2004

Christel Poirrier

18. La dynastie "carrière" des Pernot (27 avril 2004)

Christel Poirrier

19. Entretien avec Jean-Paul Campanato, comptable au long cours (13 mai 2004)

Serre Vivante

20. Une visite de la carrière de Moissey pour la Journée du Patrimoine de Pays (20 juin 2004)

Foyer rural Moissey

21. Expo sur la pierre au FPA, le résumé de l'ensemble en images, le 15 juin 2004

Foyer rural Moissey

22. Expo sur la pierre à Moissey, inauguration au Foyer-logement, le 15 juin 2004

Le Progrès, 2009

23. La carrière de Moissey continue

Jean-Marcel Téliet, 1942

24. Mémoire sur la création d'un groupe agricole dans le cadre d'une exploitation industrielle par Jean-Marcel Téliet, entrepreneur TPE, maître-carrier à Moissey, ancien des Arts et Métiers de Cluny, 1942

25. Le parcours d'un gravier depuis le front de taille de Moissey jusqu'au revêtement routier. (attente d'un gravillon candidat)

Christel Poirrier, 2010

26. Jean-Marcel Téliet, maître-carrier à Moissey de 1930 à 1954, sa vie son oeuvre

portail de moissey.com
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